Sonia Robertson

La galerie Séquence transformée en un lieu sacré
novembre 1995

par Denise Pelletier

CHICOUTIMI (DP) - Sonia Robertson prend totalement possession de la galerie où elle expose pour la transformer en un lieu différent, pour créer une atmosphère qui enveloppe totalement le visiteur.
C'est ce qu'elle a fait avec l'installation «L'arbre sacré», qu'elle présente à la galerie Séquence jusqu'au 26 novembre. Une fois entré, on se retrouve dans la pénombre, saisi d'abord par les sons plutôt que par les objets. Une bande sonore fait entendre des percussions, chants d'oiseaux, grondements de tonnerre, cascades, des textes récités aussi, tandis que l'on commence à distinguer progressivement les parties les plus éclairées de la salle.
Le gros de l'oeuvre est constitué par 32 pierres naturelles aux contours arrondis, chacune suspendue au plafond par une lanière de cuir. Elles sont disposées en un cercle qui fait tout le tour de la pièce, englobant le mur qui sépare la salle en deux parties. Ces pierres sont suspendues à des hauteurs différentes de sorte que le cercle est présenté dans un axe oblique: au ras du sol d'un côté, il se soulève progressivement vers le plafond de l'autre.
Rencontrée sur les lieux de l'exposition, Sonia Robertson, artiste ilnu originaire de Masteuiatsh, explique qu'elle s'est inspirée de la spiritualité et des croyances du peuple montagnais, comme elle le fait pour toutes ses créations. «Le cercle représente tout ce qui est cycle: cycle des saisons, cycle du  jour, cycle de la vie humaine», dit-elle. Il est divisé en quartiers par les quatre pierres qui sont emballées dans du tissu rouge, vert, blanc et noir.

Travaillant toujours en fonction du lieu où elle expose, Sonia Robertson a utilisé le mur central pour y planter ...un arbre. Un cèdre qui passe littéralement au travers du mur, lequel a dû être percé puis replâtré: d'un côté on voit le bas du tronc et les racines, et de l'autre, le corps de l'arbre lui-même. Cette dernière partie s'élève vers le haut, «vers le ciel, comme l'énergie masculine, et l'autre est plus près de la terre, comme tout ce qui est relié à l'image féminine dans la culture ilnu», explique l'artiste.
Afin de compléter l'illusion, «je voudrais que le visiteur ait l'impression de marcher dans une forêt» dit-elle, Sonia Robertson a également intégré à son installation  des projections lumineuses sur les murs. Statiques ou mobiles, reflétant les images qui bougent au gré de la lumière réfractée par des récipients de verre remplis d'eau, elles évoquent les feuilles des arbres, les eaux d'un ruisseau, la lumière variant au gré des nuages.
L'arbre sacré correspond à un mode de vie, à une vision du monde pour les autochtones, explique-t-elle. Le dynamisme de son installation est créé par la tension, l'opposition entre diverses notions évoquées: tout cela crée une impression de mouvement, d'autant plus que deux visiteurs ne verront, n'entendront pas exactement la même chose. La bande sonore a été préparée par Erik Lapierre.
Sonia Robertson étudie actuellement en arts à l'UQAC. Elle a présenté une exposition à l'Oeuvre de l'Autre en février dernier, et plus tôt, en 1994, elle a organisé à Masteuiatsh un symposium multimédia réunissant des artistes en arts visuels, en musique, en danse, en vidéo. «J'ai monté cet événement, appelé «Nishk e Tshipapmuk» («Sous le regard de l'outarde») en hommage à ma soeur, Diane Robertson, une artiste qui était déjà connue sur la scène nationale, et qui est morte subitement d'une infection foudroyante», explique Sonia Robertson.